Hello les filles,
Le temps d’un article, nous allons aborder le sujet de l’endométriose avec un handicap. On peut constater que les médias en parlent de plus en plus sauf, petit bémol, les femmes handi sont hors du coup. Est-ce normal ?
L’endométriose est une maladie très compliquée à vivre tous les jours, alors imaginez deux secondes être une femme handi avec les mêmes symptômes…
Avant de rentrer dans le vif du sujet, faisons un retour sur la définition de l’endométriose :
L’endométriose est une maladie chronique fréquente qui touche environ 10 à 20 % des femmes.
Elle se caractérise par la présence de tissu utérin (ou tissu endométrial) en dehors de la cavité utérine. Comme vous pouvez l’imaginer ça peut être très invalidant pour certaines women.
Voici quelques chiffres à propos de l’endométriose, d’après la source santé.fr
- 30 à 50 % des femmes atteintes ont une dysfertilité
- 25 à 70 % des femmes et 19 à 47 % des adolescentes souffrant de douleurs pelviennes chroniques
- 70 % des femmes atteintes ont des douleurs invalidantes
- 70 % ont des rapports sexuels douloureux
- 50 à 60 % ont une diminution de leur activité sportive, ont des troubles de l’appétit et du sommeil
- 30 % voient leurs activités habituelles perturbées
- 20 % voient leur mobilité affectée
Les premiers symptômes qu’un certain nombre de patientes ressentent sont :
- Des règles très douloureuses et parfois abondantes
- Des douleurs lors des rapports sexuels au moment de la pénétration
- Des problèmes de fertilité
- Des difficultés pour uriner
- Retrouver des traces de sang dans les urines ou les selles
- Vous pouvez également avoir des douleurs chroniques au niveau du petit bassin, de l’abdomen, de la région lombaire et parfois sur le trajet du nerf sciatique.
Pour les femmes handi ça peut devenir compliqué de faire face à l’endométriose et gérer les difficultés de son handicap. C’est pour cette raison qu’il est nécessaire d’avoir des services de gynécologie formés aux différentes pathologies pour avoir un suivi médical de qualité. Nous allons en parler plus précisément avec Aurélie. Cette femme de 43 ans, habitant avec son mari en Picardie, va partager avec nous le quotidien d’une woman handi avec l’endo depuis 2017 après des années d’errance médicale. Elle espère que son témoignage pourra aider d’autres femmes dans la même situation. Elle a fait de cette maladie invisible, le deuxième combat de sa vie. Elle sensibilise en partageant son quotidien sur la toile. ( @danslabulledaurelie).
Pour moi, il est important de montrer que même les femmes porteuses d’un handicap moteur, peuvent être touchées par l’endométriose.
Endométriose avec un handicap
1/ Comment a-t-on diagnostiqué ton endométriose ?
Je n’avais pas assez d’une particularité, il m’a fallu en ajouter une deuxième. Trêve de plaisanteries, j’ai compris que j’étais atteinte d’endo, en lisant un article sur internet.
En réalité, j’avais les symptômes, (douleurs intenses, troubles digestifs et cycles menstruels abondants et en continu), depuis plusieurs années. Cependant, ma gynécologue de l’époque, mettait mes règles « abondantes et douloureuses » sur le compte du handicap. Elle n’a jamais cherché plus loin, et n’a jamais évoqué d’endométriose. Elle se contentait de me changer de pilule, sans forcément, prendre le temps de m’examiner (par manque de temps…), ni de me faire faire des examens approfondis.
Un jour, je suis tombée sur un article qui parlait d’endométriose… J’ai tout de suite fait le lien avec mes symptômes… Très vite, j’ai décidé de changer de gynéco et j’en ai trouvé une, spécialiste de l’endométriose. Dès lors la machine était lancée, je ne m’étais pas trompée.
2/ En combien de temps le service médical a-t-il su que tu étais atteinte de cette maladie ?
Environ 2 mois se sont écoulés, entre la visite chez le spécialiste et la pose du diagnostic.
3/ De quelle manière arrives-tu à gérer l’endométriose avec ton handicap ?
Atteinte d’une Infirmité Motrice Cérébrale de naissance en fauteuil roulant, dépendante physiquement pour la plupart des gestes du quotidien, certains jours sont plus compliqués que d’autres, mais je gère au mieux. Aujourd’hui, je suis suivie de près pour l’endométriose, j’ai subi deux interventions chirurgicales et je suis son traitement en continu.
La maladie étant hormono- dépendante et inflammatoire, j’ai adapté mon hygiène de vie en conséquence, afin d’éviter les crises. Le plus difficile à gérer est le fait que l’endométriose soit invisible. Beaucoup de gens ignorent ses conséquences. Par exemple, mes aidants ne comprennent pas toujours ma fatigue chronique ou mon hygiène de vie, etc.…Au quotidien, je sensibilise au maximum, mais c’est une charge mentale énorme.
4/ Quel est ton quotidien avec tes crises ?
Tout d’abord, il faut savoir que les crises peuvent être quasi quotidiennes, le moindre stress, le moindre aliment trop gras peut en déclencher une.
Aussi surprenant, que cela puisse paraître, dans ma vie de tous les jours, l’endométriose me gêne davantage que mon handicap de naissance ! Les jours de crises, les douleurs augmentent ma spasticité et mes contractures involontaires. Je souffre d’une forme d’Endométriose profonde, qui s’étend sur plusieurs organes, dont le tube digestif. Les troubles digestifs et intestinaux rythment mon quotidien. Une vraie galère lorsqu’on est en fauteuil. En crise, je peux être amenée à devoir effectuer seule jusqu’à 10 transferts wc/fauteuil, par jour.
Contrairement à ce que beaucoup de médecins s’imaginent, je n’ai pas en permanence une auxiliaire de vie pour m’aider.
Autre exemple, je fais beaucoup de crises après les repas. En effet, je ne peux cuisiner seule et cela pose un réel problème, car l’alimentation joue un rôle important dans la gestion de la maladie. En théorie, je dois privilégier la cuisine faite maison, sans matières grasses, mais cela n’est pas toujours évident, car la plupart de mes aidants ne savent pas cuisiner. Là encore les médecins ignorent totalement cette réalité. Les aidants ne se rendent pas compte des conséquences du non-respect de mon régime alimentaire.
Enfin, les crises nocturnes sont les plus compliqués à gérer, car je ne peux pas me lever du lit seule. Mon époux étant également en situation de handicap, il ne peut pas m’aider.
Alors, avec beaucoup de systèmes D, nous gérons au mieux jusqu’à l’arrivée de l’auxiliaire de vie. Les nuits blanches sont fréquentes.
Les crises, la fatigue chronique impactent forcément la vie sociale, néanmoins, je continue à vivre, à sortir et à avancer dans mes projets. Depuis peu, je participe à un groupe de travail composé de patientes Endo/handi et de médecins qui œuvre à la création d’une consultation spécifique endo/handi.
5/ As-tu réussi à trouver un bon gynécologue, à l’écoute de tes problématiques ?
Aujourd’hui oui, mais cela a été le parcours du combattant pour le trouver, j’ai changé 7 fois de médecins avant d’être prise en charge correctement par une équipe spécialisée et pluridisciplinaire, du centre de l’endométriose de l’hôpital Saint-Joseph à Paris. Consultation connue grâce à l’association Endomind France pour laquelle j’ai été bénévole, durant quelques années. Cette association milite entre autres pour une meilleure reconnaissance de l’endométriose. Ce fût la seule à m’accepter comme bénévole avec mon handicap. Malheureusement, cette consultation est loin de chez moi, et les allers-retours deviennent très fatigants. La prise en charge de l’endométriose au niveau régional se généralisant, j’ai tenté, récemment, de me faire suivre près de chez moi.
Fiasco total. Je suis tombé sur un médecin qui n’a rien compris à ma problématique. Il a tout mis sur le compte du handicap et son discours était rempli d’a priori et de préjugés (sur la sexualité des femmes handi). Bref, je me suis revue quelques années en arrière. Je n’ai pas d’autre choix que de continuer à aller à Paris pour le suivi gynécologique… Néanmoins, j’ai tout de même réussi à faire transférer mon suivi douleurs, près de chez moi.
La Féminité avec l’endo !
1/ L’endométriose associée à ton handicap t’empêche-t-il d’avoir une féminité comme tu le souhaites ?
Non, pas vraiment, j’aime prendre soin de moi.
2/ Connais-tu le jean Serenity de la marque Rue du Colibri ?
Depuis peu grâce à vous !
3/ Cela a-t-il des conséquences dans ta vie de couple au niveau de votre intimité ?
Honnêtement, oui, l’endométriose impacte la vie de couple, face à mes douleurs chroniques, mon conjoint se sent démuni. Elle rend les rapports intimes douloureux.
4/ Pour certaines femmes avoir un enfant lorsque cette maladie est présente peut-être le parcours du combattant, veux-tu nous dire quelque chose sur le sujet ?
Plus de 40 % des femmes atteintes d’endométriose ont des soucis de fertilité.
Pour ma part, au vu de nos handicaps respectifs et avant même l’annonce de mon endométriose, mon mari et moi avions décidé de ne pas avoir d’enfant. Cette décision reste encore, pour moi très douloureuse, une plaie béante qui ne se refermera jamais.
5/ Quels vêtements souhaiterais-tu que les marques créent pour être le plus confortable possible et fashion ?
Un jean fashion solide mais souple. Sans bouton, mais avec des passants faciles à attraper afin de pouvoir le remonter seule plus facilement
L’endo et les women handi !
1/ Que penses-tu des prises en charge médicales de cette maladie pour les femmes handi ?
Il y a encore beaucoup de travail dans ce domaine. Je pense que l’endométriose touche davantage de femmes handis qu’on ne le pense. Les médecins ont tendance à tout mettre sur le compte du handicap, car la prise en charge gynécologique des femmes handis reste compliquée.
La prise en charge de l’endométriose ne peut être la même chez une femme handi. Il faut que les médecins parviennent à adapter leur prise en charge.
2/ Qu’as-tu envie de dire à la classe politique ayant voté contre le congé menstruel à l’Assemblée nationale ?
C’est le résultat d’un travail de longue haleine pour les associations. Une victoire pour toutes les femmes. Une forme de reconnaissance de la maladie.
3/ Pour toi, quelles sont les trois choses primordiales à mettre en place pour les femmes handi atteintes d’endo ?
1) Former davantage les gynécologues et les équipes pluridisciplinaires aux handicaps moteurs. Ouvrir une consultation spécifique.
2) Obliger toutes les MDPH à tenir compte de l’endométriose, dans le cadre d’une PCH, pour les femmes handis
Par exemple, à l’heure actuelle, celle de mon département pense encore que l’endométriose ne me gêne que quelques jours par mois (pendant mon cycle) et ne voit pas l’utilité d’augmenter mes heures d’aides humaines les jours de crises.
3) Sensibiliser les aides à domicile, les aidants à la maladie et à ses conséquences au quotidien.
4/ As-tu une astuce pour faire diminuer les crises ?
Faire attention à son alimentation. Éviter le stress, respecter les limites de son corps.
5/ As-tu une chose à rajouter te tenant à cœur ?
Cassons les préjugés !! L’endométriose n’est pas qu’une histoire de règles ! C’est une vraie saloperie douloureuse au quotidien. Une vraie saloperie non mortelle, mais silencieuse et incurable. On apprend à vivre avec, mais elle ne se guérit jamais totalement.
Pour finir cette interview, as-tu quelque chose à dire aux lectrices de ParisienneJolly ?
Il n’est pas normal de souffrir atrocement durant vos cycles menstruels. N’hésitez pas à consulter, à en parler le plus tôt possible.
Un grand merci à Aurélie d’avoir partagé sa vie avec l’endométriose. Il est important de parler davantage d’endométriose et de handicap dans les différents médias français et mettre en place dans chaque ville de France, des services spécialisés dans ce domaine pour éviter que certaines femmes handi soient obligées de faire le parcours du combattant avant d’avoir un diagnostic et des soins médicaux adaptés à leurs problématiques.
Depuis peu les femmes atteintes d’endo peuvent faire une demande de reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH).
Voici également quelques liens utiles pour trouver de l’aide si besoin :
Mon Endométriose Ma Souffrance (MEMS)
Contact local Ile de France : vanessa_mems@yahoo.fr
Karukera Endométriose (basé en Guadeloupe)
Les filles prenez soin de votre body!
Crédit photo FamilleDechambre.
Article écrit par Sandrine Ciron